26 nov. 2007
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Courbettes
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Nicolas Sarkozy veut faire confiance à la Chine. Débarqué hier matin à Xian (dans la province du Shaanxi) pour visiter au pas de charge le site de la fameuse armée enterrée, il a eu dans la soirée un premier dîner restreint avec son homologue chinois, Hu Jintao. A table, six personnes de chaque côté et ce commentaire, à la sortie, d’un haut diplomate qui participait aux agapes : «Quand le roi de France et l’empereur de Chine dialoguent, les autres convives ont les baguettes dans une main et le stylo dans l’autre.» En clair, seuls les deux Présidents ont pris la parole pour une «partie de ping-pong» davantage destinée à se séduire mutuellement qu’à marquer des points. Les maîtres de la Chine peuvent se rassurer, la politique du kowtow - cette courbette pratiquée à l’époque impériale – pratiquée par Jacques Chirac ne connaîtra aucune rupture. Le nom de l’ancien Président français a d’ailleurs été évoqué au cours du dîner d’hier, et Nicolas Sarkozy a indiqué qu’il s’inscrivait «dans la continuité de [son] prédécesseur, avec l’intention de faire mieux». Sur Taïwan, un sujet qui obsède la Chine communiste, il a indiqué que «la position de la France est constante»: en clair, il n’y a pour Paris qu’une seule Chine, et l’île de Taïwan en fait partie. Comme Jacques Chirac en son temps, Nicolas Sarkozy a lui aussi assuré être favorable à la levée de l’embargo sur les importations d’armes par la Chine. La France se fait même forte de «travailler dans la discrétion» pour convaincre l’ensemble de ses partenaires européens de «mettre fin à une mesure qui remonte à l’époque de la répression de la place Tienanmen», en 1989.
Pour mettre ses hôtes dans de bonnes dispositions et pouvoir aborder tous les sujets, le président français s’est dit «fasciné par la capacité de la Chine, si enracinée dans l’Histoire, à se projeter dans l’avenir». Le mois dernier, la France avait pris soin de transmettre ses vœux au Parti communiste chinois pour «le succès du dix-septième congrès» qui, dans un exercice modèle de démocratie, avait confirmé le pouvoir de l’équipe en place pour cinq années supplémentaires. En remerciement, les Chinois ont fait traduire, à la veille de son arrivée, le livre Témoignage de Nicolas Sarkozy (Jianzheng en chinois). Certes, avec un tirage de 5000 exemplaires pour 1,3 milliard d’habitants…
Pour son opération séduction, le chef de l’Etat semble prêt à tout. Le symbole le plus éclatant est l’absence de Rama Yade, secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme, sommée de rester à Paris (Libération des 24-25 novembre). Une manière de ne pas lui faire jouer les potiches à Pékin où d’éventuelles rencontres avec des défenseurs des libertés auraient compromis la réussite du voyage présidentiel et les mirifiques contrats que Sarkozy va parapher aujourd’hui (lire page 3). La question des droits de l’homme a cependant été abordée hier soir. Mais elle n’a pas été élevée au rang des «grands objectifs» de la visite comme les «relations économiques harmonieuses». En se défendant de «vouloir donner des leçons», selon un participant au dîner, Nicolas Sarkozy a réclamé que la Chine aille vers une «suspension progressive des exécutions» capitales. Il a demandé davantage de libertés pour la presse à l’occasion des JO de Pékin, l’an prochain, et a timidement évoqué la question du Tibet.
Cette politique de la prudence, voire de la complaisance, sur les droits de l’homme n’a jamais rapporté à la France les retombées économiques escomptées. Mais Nicolas Sarkozy est persuadé qu’avec lui, les entreprises françaises vont enfin en finir avec leurs modestes parts de marché (environ 1% contre plus de 4% par exemple pour l’Allemagne). Accompagné d’une noria de patrons du CAC 40, il a participé hier en fin de journée à Pékin à un colloque réunissant quelque 200 dirigeants de PME françaises. Près de 10 milliards d’euros de contrats devraient être signés dans «l’Eldorado chinois», comme on dit à l’Elysée, avec des gros lots pour les réacteurs nucléaires d’Areva et les avions d’Airbus. Du business pas vraiment écolo, alors que Nicolas Sarkozy a «fait du mot environnement la marque de sa visite», affirme l’Elysée. Il prononcera demain à l’université de Quinghua à Pékin un discours sur l’environnement et va signer avec Hu Jintao une déclaration sur ce thème. «Une première», se félicite Paris, pour les Chinois, devenus les principaux pollueurs de la planète.
Enfin, le président de la République veut avoir confiance en la Chine et ses dirigeants pour «jouer un rôle constructif» dans les grandes crises internationales. Pékin ayant contribué à amener la Corée du Nord à renoncer au nucléaire militaire, Nicolas Sarkozy a demandé hier soir à Hu Jintao d’être plus actif dans le dossier du nucléaire iranien. Estimant que la Chine a joué un «rôle positif» ces derniers mois en Birmanie, il a demandé son aide pour obtenir de Rangoun des visas pour ses ministres Bernard Kouchner et Rama Yade. Entre amis, il faut bien se rendre service |
posted by Fawzi. Benabdallah
lundi, novembre 26, 2007
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